En janvier Matisse subit une grave opération à Lyon, à l’âge de 72 ans. Hospitalisation pendant trois mois, puis longue convalescence.
En mai Matisse retourne à Nice dans son appartement du Régina à Cimiez où il habite depuis deux ans.
S’étant rétabli comme par miracle, Matisse a le sentiment de vivre un rabiot. « Il me semble être dans une seconde vie » écrit-il à Marquet.
Monique Bourgeois étudiante infirmière est embauchée comme infirmière de nuit chez Henri Matisse à Nice. Accueillie par Lydia Delectorskaya, secrétaire de l’artiste, elle prend soin de Matisse, lui fait la lecture et partage avec lui de longues discussions. Peu à peu s’établit entre eux une relation amicale empreinte de simplicité, de franchise et d’humour.
Matisse propose à Monique Bourgeois de poser comme modèle. Plusieurs dessins seront réalisés ainsi que quatre peintures : Monique et L’Idole en décembre 1942 ; La Robe verte et les oranges en janvier 1943 et Tabac royal en mars 1943.
Matisse, redoutant une évacuation de Nice, s’installe à Vence à la Villa « Le Rêve ». A l’automne Monique Bourgeois, de santé fragile, s’installe comme pensionnaire chez les sœurs dominicaines de Vence qui recevaient des convalescentes. Matisse loge juste en face. Elle assure chez l’artiste quelques gardes de nuit, des gardes de jour et des séances de poses pour quelques dessins.
La vocation religieuse de Monique Bourgeois s’affirme. Un père dominicain l’oriente vers les dominicaines de Monteils (Aveyron), congrégation dont dépendent les dominicaines de Vence où elle réside.
En février Monique Bourgeois décide d’entrer chez les dominicaines de Monteils. Elle fait ses adieux à Matisse, désemparé par sa décision.
En septembre elle entre au noviciat, prend l’habit des dominicaines et reçoit le nom de Sœur Jacques-Marie.
Sœur Jacques-Marie reçoit une longue lettre de Matisse qui accepte désormais de voir son modèle au couvent. Apaisé, il forme des vœux pour la réalisation de son idéal.
Sœur Jacques-Marie prononce ses premiers vœux religieux le 8 septembre puis revient à Vence et reprend son activité d’infirmière. Matisse est très ému de la revoir en religieuse.
A Vence les sœurs dominicaines ne disposaient que d’un ancien garage en guise de chapelle. Il était dans un grand état de délabrement. Les sœurs envisageaient de construire une chapelle. Sœur Jacques-Marie dessine en août un projet de vitrail représentant l’Assomption. Elle le montre à Matisse qui l’encourage à faire réaliser ce dessin en vitrail.
Fin 1947, un jeune frère dominicain, le frère Rayssiguier, visite les sœurs de Vence. Apprenant que Matisse habite à proximité il souhaite le rencontrer. Les sœurs le présentent comme étant l’architecte de leur future chapelle. C’est au cours de cette première entrevue que Matisse et le frère Rayssiguier élaborent l’essentiel du projet de la chapelle. Matisse dira le lendemain à la sœur : « Je vais construire votre chapelle et je me charge des vitraux ! »
En janvier les plans de la chapelle sont définitivement conçus. La construction est confiée à l’architecte Louis Milon de Peillon sous la haute autorité d’Auguste Perret. Quatre années de travail assidu et exclusif seront consacrées par Matisse à la conception et la réalisation de la chapelle, conçue comme une œuvre d’art total.
A la demande de Matisse, sœur Jacques-Marie réalise en contreplaqué une maquette au dixième de la chapelle d’après les plans du frère. La maquette est installée chez Matisse.
Matisse travaille, au moyen de ses papiers gouachés découpés, au premier projet de vitraux : le grand vitrail double du chœur, La Jérusalem céleste et ceux de la nef, Les Abeilles.
En juin, Matisse part quelques mois à Paris. Il reçoit la visite du père Couturier, dominicain, qui se charge d’intervenir auprès de la mère Agnès, Supérieure générale des dominicaines de Monteils, afin de la convaincre de donner son accord pour que Matisse réalise la chapelle de Vence. Sœur Jacques-Marie reçoit la responsabilité tacite de cette réalisation.
Matisse commence à réaliser de nombreuses esquisses pour la Vierge à l’Enfant et le Chemin de croix.
En janvier Matisse quitte la villa « Le Rêve » pour s’installer dans son appartement du Régina à Nice, dont les grands volumes se rapprochent des dimensions de la chapelle pour travailler sur les maquettes des panneaux et des vitraux à l’échelle.
Matisse travaille sur une nouvelle version de vitraux autour du thème de l’Arbre de Vie.
Il réalise de nombreux dessins préparatoires pour les panneaux de Saint Dominique, la Vierge à l’Enfant et le Chemin de croix.
Le 12 décembre, cérémonie de la pose de la première pierre par l’évêque de Nice.
La construction débute et dure un an. Matisse peint sur des carreaux de céramique les panneaux du Chemin de croix, de la Vierge à l’Enfant et de Saint Dominique.
Pose de la flèche sur le toit et pose des vitraux par le maître-verrier Paul Bony, en présence du père Couturier. Matisse réalise le tondo en céramique de la Vierge à l’Enfant placé à l’extérieur au-dessus du vitrail double du chœur.
Matisse conçoit l’ensemble des vêtements liturgiques.
Le 25 juin, cérémonie de la bénédiction de chapelle par Mgr Rémond, évêque de Nice.